l'horloge de la gare de Chartres

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mercredi 2 mars 2016

De la ville au Loing #11

Cette fois, partir au Loing sans réunion à laquelle assister, sans atelier à mener. Simplement, emporter un appareil-photo, un enregistreur, traverser de nouvelles villes, revenir à des lieux déjà visités (Moret, Saint-Mammès). Au début il fait beau et sec puis le temps se gâte. Il faut chercher où écrire, où se réfugier.

 



Champs, bois, commerces et volets fermés. Que dire de ces paysages lorsqu'ils sont pour soi sans attache, qu'ils se succèdent simplement, n'offrent rien aux regards tandis que la voix du GPS suit la seule logique connue ?
(il faut bien un point d'arrivée)
Si on s'arrêtait par ce temps le long de la route, au centre du village désert, sans raison, sans but, que se passerait-il ?

Si on était seul(e) en forêt, sous la pluie ? Ou catapulté(e) quelque part, sans repère ?

Il suffit de peu pour faire de la fiction : ouvrir l'oeil, associer à sa phrase la photo d'une voiture sur une place de parking. C'est plus simple sans doute que de répondre aux questions sur l'errance, sur la sortie de route, ce qui déraille, se déroule sans qu'on en maîtrise la portée - en écrivant je pense à mon personnage de la Ville au Loing, j'y pense dans la voiture tandis que lui ne voyage qu'en train.


Retour à la vie de la résidence : à Saint-Mammès, nous retrouvons Luc Bonnin, le bibliothécaire, et monsieur Mariage qui tient la promesse qu'il nous avait faite à bord de la péniche Jonor : nous emmener faire un tour en bateau. Luc nous entraîne d'abord dans les venelles, où vivent souvent les anciens mariniers.



 
Puis nous montons à bord, abrités de la pluie, retrouvons monsieur Mariage qui, comme la fois précédente, raconte mille choses de sa vie ancienne. Je l'écoute. Mon personnage (comment le désigner, lui qui n'a ni nom ni sexe ?) s'imagine, lui, une vie en péniche mais c'est d'une dérive qu'il s'agit : il n'arrive pas à se fixer. Ni les rideaux de dentelle ni les amarres larguées ne lui apportent de solution. 
Les non-mariniers s'appellent les terriens, apprenons-nous.













Enfin voilà l'endroit où j'avais envie de me trouver. Une bouée verte indique le lieu où une péniche a coulé : l'eau n'est pas assez claire pour apercevoir la silhouette du bateau mais à certains détails, il est possible de l'imaginer.




Au fond, je crois que mon personnage ressemble à ce genre d'endroit : on le trouve là où il est susceptible de réinventer l'invisible. Toujours dans un lieu réel, oui, que ce soit à la gare de Lyon, sur les bords de Loing ou ailleurs, mais ce qui nous saute aux yeux ne l'atteint pas.











 


(ci-dessus, à bord, deux êtres plus tangibles : Pierre Cohen Hadria et Désiré Mariage)



(et Luc quittant le bateau)

Ce personnage, si on veut on peut l'entendre par ma voix sur le site de L'aiR Nu, ainsi que celui de Joachim Séné qui lui attend De l'autre côté, extraits d'un travail en cours qui devrait prendre trois formes : site, livre numérique, livre papier (version brute, écoute au casque conseillée).
Ce personnage, il se promenait avec moi l'autre jour à Moret, m'avait précédée dans le hall d'entrée de la bibliothèque tandis que j'allais animer l'atelier - normal, il connaissait déjà les lieux. De retour à Paris, le voilà plus évanescent que jamais. Il perd de sa substance au fil des kilomètres, signe qu'il est temps de le faire découvrir, peut-être.



Qu'il s'ancre un peu, comme dans les venelles.

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