l'horloge de la gare de Chartres

l'horloge de la gare de Chartres

lundi 25 mars 2013

sur le toit, au soleil




























































































je me souviens comme il croisait les bras, droit devant moi, debout, en m'écoutant parler et en me regardant tandis que je défendais Franck devant les représentants de chez Stock 
(ça ne rigolait pas : des questions directes comme je n'en ai jamais eues depuis)
je me souviens de Brigitte, juste à côté de moi et de la façon dont nous en avons parlé, toutes les deux, de ce livre à Lyon devant les libraires quelques temps plus tard
(la sensation d'être debout, oui)
je me souviens du message de Brigitte, plus tôt, quand elle avait su qu'il aimait le livre
je me souviens aussi de ces photos prises sur le toit de chez Stock, en douce, cinq minutes de pause je ne sais plus quand (le jour de la réunion avec les représentants ? peut-être) pour s'approprier les lieux
par le vent, le soleil

*

ce post et ces photos sont pour Brigitte Giraud

dimanche 24 mars 2013

rue Daguerre















il faudrait y retourner
(je ne sais si c'est : dans la tête, dans la rue)
les Halles, le lac, les trois villes du 93 ont pris place, toute la place ou presque et la voici ailleurs, passée où, cette rue Daguerre, dans quelle région du cortex ?

une photo, qui n'est pas là pour faire joli, mal cadrée, vite prise : l'épicerie du film

vraiment, la même ?
toute petite à l'intérieur, bien plus qu'on ne le croit en voyant, revoyant, revoyant Daguerréotypes
(les rayonnages, peut-être, disposés autrement ?)

une photo, ces notes, un clic pour servir de tremplin
hop

allez

mardi 19 mars 2013

Pecha Kucha jeudi prochain au centre Cerise















Qu'on se le dise : jeudi soir, au café Reflets du centre Cerise, 46 rue Montorgueil, à Paris, pour la seconde soirée de ma résidence j'inviterai cinq auteurs à lire et à projeter des photographies sur le thème du terrain de je/u. La forme ? Le Pecha Kucha : 20 photos projetées 20 secondes chacune, soit 6 minutes 40 par personne pour faire entendre sa voix, nous entraîner ici ou ailleurs...

Ces auteurs, photographes, blogueurs, plasticiens et que sais-je encore sont :
Emmanuel Delabranche http://apeineperdue.blogspot.fr/
Juliette Mezenc http://www.motmaquis.net/
Mathilde Roux http://www.mathilderoux.fr/
Cécile Portier http://petiteracine.net/wordpress/
et Olivier Hodasava http://dreamlands-virtual-tour.blogspot.fr/

Bienvenue !

lundi 18 mars 2013

Journal de la chambre verte #2




















Je ne suis pas dans la chambre verte mais dans un TGV Nantes Paris. Des images de lac, de façades Art Nouveau, de tableaux, de vitrines, rue Daguerre et Beaubourg et Bruxelles et Grand Lieu, château, arbres en fleurs, neige, verglas et soldes peuplent cet écran où j'écris. Le train freine, épingle à la vitre les églises, forêts que le wagon délaisse. Dans cette lenteur de quelques minutes, une demeure de zinc, son miroitement, de courtes hachures devenues brins de paille.

Je voudrais raconter la lecture au centre Jean Dame le 6 mars dernier, revenir au très près (le micro, la scène, Jean-Marc à ma droite) mais cette vie de nomade et le sentiment de si grand présent qu'elle procure m'en détournent. Il y a le carnet qui sert de journal. Les livres offerts. Celui que je lis (Fenêtres, de Pontalis, un cadeau de plus). Les champs inondés. Une nuit passée dans une chambre rose - oui, tiens, les couleurs de chambres, le voilà peut-être, le sujet...

Une chambre à soi, une pièce à soi, je pense à Juliette Mezenc que j'invite la semaine prochaine.
Au rideau baissé par le voisin de derrière (trop de soleil, trouve-t-il) dans le TGV.
A cette tension, lecture La Fayette, aux conseils de Jean-Marc pour attaquer fort.
A la robe cerise que j'ai portée là pour la première fois, don des bénévoles de Cerise, justement, tandis que nous étions, au Café Reflets, à trier des jeans, des vêtements d'hiver, des manteaux immenses.
Je ne vais pas assez à Cerise, pour l'instant, mais la chambre verte m'entête.
Tout travaille, insensiblement.

Alors, cette lecture ? (nous voilà au Mans, à l'ombre du quai, le voisin relève le store) Comme à Marseille, où nous l'avions déjà tentée, j'ai demandé d'une voix trop faible à ce qu'elle soit enregistrée. La phrase s'est perdue dans la conversation. Puis j'ai oublié. Il n'y a pas d'enregistrement et je crois que ce n'est pas un hasard
(mesdames, messieurs, cet arrêt n'est pas prévu, veuillez ne pas tenter l'ouverture des portes)
je ne dois pas vouloir que cette lecture s'inscrive, se grave quelque part.
(mesdames et messieurs notre TGV va repartir dans quel-ques-ins-tants)

Robe cerise au-dessus du genou parce que, si j'écris, et lis, en public Corps contre lequel lutter pour ne pas le cacher toujours, et même s'il s'agit de celui de n'importe quelle femme, ce n'est pas le moment d'arriver en jean, en vêtement d'hiver, en manteau immense.
Robe cerise, pupitre, boite à musique avec laquelle Jean-Marc Montera joue de la guitare. Devant, le noir complet : au théâtre Jean Dame, on ne voit pas le public.

Cette lecture est un travail de nerfs, d'attention, quarante-cinq minutes de bifurcations sans quitter la route. Et c'est un duo, vrai duo : sans lui, rien à faire, on ne m'y verrait pas. Il me porte, me tient, éloigne d'un geste l'anxiété qui minait les jours précédents, la peur que quelque chose, à l'intérieur, s'écroule – ce qui arrive ensuite, systématiquement.

Après il faut reconstruire.
Ainsi apparaissent les chambres aux couleurs multiples.

*

photo : avant lecture, répéter le texte sous le ciel de Paris
pour entendre la lecture audio du texte ci-dessus et voir la photo correspondant à l'après-lecture, il suffit de se rendre sur remue.net.

mardi 12 mars 2013

Rencontre vendredi aux Buveurs d'encre (Paris 19e)















Quelques fleurs (de neige, probablement) pour annoncer la rencontre à la librairie des Buveurs d'encre qui aura lieu vendredi prochain à 19h. Yves Martin, qui m'a déjà reçue pour Fenêtres, Cowboy Junkies et Franck m'interrogera sur Décor Lafayette, dont je lirai quelques extraits. 

La remontée de la rue La Fayette à partir de la rotonde de Stalingrad n'est pas prévue, mais sachez que la librairie est située dans le quartier, au 59 rue de Meaux (métros Bolivar, Jaurès, Stalingrad). Le Peace and Love et la Pointe Lafayette se trouvent à cinq minutes : bienvenue dans le décor, donc, et à vendredi !

lundi 11 mars 2013

dans le grand magasin (suite)



















Le grand magasin a aimé l'Art nouveau, s'en est éloigné pour renaître paquebot dans les années 30 (dans mon livre, a pris la forme d'un yacht et bien entendu, continue de parler, d'adresser des signes à ceux qu'il fascine). Après la destruction de l'escalier d'honneur en 74, on dirait qu'il compte à nouveau sur les volutes et le végétal pour nous retenir - j'écris cela, parce que j'ai placé au-dessus de ce texte la photo d'un plafond de café, à Bruxelles, mais ce n'était pas du tout ce que je voulais dire, au départ.

Ce matin, je voulais écrire sur le fait de lire, aujourd'hui, de ce que ça représente pour moi, et croiser mes phrases à quelques fenêtres bruxelloises. Je savais très bien ce que je voulais. D'ailleurs, je le sais toujours, comme je sais que ce billet sur la lecture me prendra nécessairement du temps. Mais j'ai commencé à regarder les photos et j'ai bifurqué - sujet même de l'article, bien sûr. 

J'ai également pensé (ce lire venant à la suite du être lue de l'autre jour) qu'il me fallait également évoquer ici le long et très bel article de Christine Marcandier sur Médiapart à propos de Décor Lafayette. Un article qui contient plusieurs vidéos, dont une interview réalisée dans la chambre verte, autant dire mon terrain de jeu à Cerise : de quoi bifurquer à nouveau...

Alors, avant de retrouver ma boucle, fenêtres et phrases, je voudrais la remercier, dire que je me sens, à la lire, parfaitement comprise. Dans l'interview, à l'une de ses questions je réponds que je suis obstinée, et c'est vrai (comment faire autrement, de toute façon ?). Mais tout de même, et sans jamais savoir s'il constitue un socle au moment d'écrire, évidemment qu'il compte, cet écho.

mardi 5 mars 2013

décor en scène
















Demain, à 19h30, au théâtre Jean Dame (17 rue Léopold Bellan, Paris 2, métro Sentier), je lirai des extraits de Décor Lafayette en compagnie du guitariste Jean-Marc Montera.

Voici une petite présentation de la soirée :

Décor Lafayette est un livre paru aux éditions Inculte.
On y trouve, par moments, une femme qui remonte la rue La Fayette pour se rendre aux grands magasins. Elle croise des hommes, la foule, une femme, deux gares, des rues, passe devant un hôtel ou un magasin de bricolage...
Jean-Marc et moi, nous vous proposons de la suivre durant 40 minutes environ.
Ce sera le premier "événement" de ma résidence au centre Cerise, soutenue par la Scène du balcon. C'est gratuit et s'inscrit dans le cadre du Printemps des poètes

*

C'est la quatrième fois que Jean-Marc et moi travaillerons ensemble : Fenêtres à Marseille, puis à Montreuil, Décor Lafayette à Marseille...Paris, première non-ville en M de notre parcours !
Comme on l'aura compris, je crois, cette lecture musicale risque de ne pas nous entraîner vraiment aux grands magasins... De toutes façons, avec un spécialiste de l'improvisation, peut-on savoir à l'avance où l'on va ? Jamais vraiment : c'est tout le jeu et le plaisir (le grand plaisir de lire en sa compagnie).

(la photographie, prise à Marseille au théâtre Les Bancs publics, est de Pierre Ménard)

vendredi 1 mars 2013

L'une chante et l'autre pas, vase communicant avec Thierry Beinstingel

Voilà qui n'est pas très mystérieux : c'est vrai, Thierry Beinstingel et moi nous nous connaissons et discutons parfois de ce que nous écrivons (cliquez sur le lien, vous verrez apparaître Autour de Franck, texte né d'une lecture de Thierry, si beau cadeau...). C'est ainsi que l'idée nous est venue, il y a quelques temps, d'un échange autour d'Agnès Varda. Chacun son film : L'une chante l'autre pas, pour lui, Le Bonheur pour moi. 70's sur Fenêtres, 60's sur Feuilles de route...
Avec de l'avoir pour ami, cependant, j'ai d'abord été l'une de ses lectrices. Central, Composants, CV roman, Paysage et portrait en pied-de-poule, Bestiaire domestique sont autant de livres que j'aime et qui m'accompagnent depuis longtemps, pour ne pas toujours citer que les plus récents. Sur Feuilles de route, le site de Thierry, chacun a son dossier : n'hésitez pas ! Et partagez ses étonnements, lisez ses notes d'écriture et de lecture, scrutez sa webcam...
Autant de raisons qui me rendent si heureuse de l'accueillir ici, en ce premier vendredi du mois, jour de vases communicants.

*



















 Je n’avais jamais regardé un film d’Agnès Varda à l’époque. Par la suite non plus d’ailleurs, ou probablement par inadvertance comme pour L’une chante et l’autre pas. C’était aux alentours de 1979. Je peux cerner la date à dix mois près : il me reste le lieu précis dans lequel j’ai vu ce film à la télévision, une caserne de la Marne que j’ai occupée de juin 1979 à mars 1980 à l’occasion de mon service militaire. C’est sans doute pour cela que reste si présent en moi le souvenir de ce film féministe entrevu dans un monde exclusivement masculin.

*

Du film, je ne me souviens de rien, même pas de l’intrigue, ni des acteurs, juste le titre et le nom de la réalisatrice. A l’époque, sans être féru de cinéma, j’aimais y aller. Dans ma petite ville, les salles avaient pour nom Vox et l’inénarrable Cinéma les jeunes : photos de Clark Gable dans le hall, fauteuils à poussière et entracte au milieu de la séance avec glaces Miko. A la fin des années soixante, c’était d’abord les films d’aventures Vingt mille lieues sous les mers et Kirk Douglas pour moi, tandis que ma frangine allait voir Mary Poppins. Dans les années adolescentes, Barry Lindon m’était apparu trop léché, trop américain. J’avais frissonné comme tout le monde devant L’exorciste mais rigolé deux ans plus tard devant Les dents de la mer. J’étais attiré par des films moins tape à l’œil : Rêve de singe de Marco Ferreri (excellence de Marcello Mastroianni, jeu sobre de Depardieu - si, si à l’époque). Le film L’amour en herbe m’avait plu, surtout la chanson de Maxime Le Forestier Amérique sur Seine que j’essayais de reproduire à la guitare. L’Amérique et la Seine réunies, c’était pour moi l’exotisme le plus pur.

Finalement, le service militaire avait répondu à cette attente de changement tropical. En débarquant dans cette caserne de l’Est, on m’avait propulsé dans une chambre occupée par deux bagarreurs forts en gueule, deux chtis impossibles à comprendre. Coup de bol : l’un avait une guitare qu’il ne savait pas accorder, moi si, et je suis vite devenu intouchable. Pendant dix mois, j’ai occupé la fonction de barman. Servir le café le matin, les bières l’après midi, le vin des adjudants toute la journée, planquer les bouteilles de Pastis pour les inspections, raisonner ceux que la boisson tournait aigre : je n’ai pas vu le temps passer. Le noir qu’on appelait Blanche Neige, le type que j’avais agrippé par le col, cassant au passage la chaîne offerte par sa fiancée, bagarres, conneries jusqu’à ceux qui avaient découpé au chalumeau un coffre rempli de munitions parce qu’ils avaient perdu la clé : absurdité d’un monde qui tenait lieu d’exotisme.

C’est un soir, probablement tard, juste avant de ranger la salle de télévision attenante au bar que j’ai regardé L’une chante et l’autre pas. Nous étions seulement deux (avec le noir nommé Blanche Neige). Sentiment étrange, pourquoi s’en souvenir ? Un film féministe, dans cette salle de télé si triste, caserne en îlot minuscule, hommes de troupe et troupeau d’hommes en retrait du monde.

Quelques bribes bien sûr peuvent se rattacher à l’époque et à l’endroit même : Patrick Hernandez chantant Born to be alive aux variétés du dimanche un jour de consigne. La même salle de télé, et un jour plus de téléviseur : les voleurs étaient passés par un vasistas, avaient poussé l’appareil au-delà du grillage de la caserne. Si on étend les lieux, il y a la petite route sur laquelle j’avais essayé une Renault 5 « de sport » qu’un type voulait me vendre. Souvenir aussi de l’arrivée dans une ville (mais quelle ville ?) à 170 km/h, serrés à six dans une vieille Ford Taunus 17 M. Le cinéma, on y revient : époque glauque de films pornos vus en virée mâle, cheveux ras, cous cramoisis, ambiance macho.

Arrive alors L’une chante et l’autre pas. Décor seventies, on y était, nos têtes à la Starsky et Hutch, les filles à longues robes paysanne, retour à la terre, le féminisme, l’avortement, des thèmes militants pour l’époque A trente ans de distance, plus rien ne transparaît, j’ai visionné un extrait, probablement le début du film, belle musique, violon et violoncelle (ce que je connaissais de la musique classique se résumait aux orchestrations de Paul Mauriat), succession de photographies aussi, portraits expressifs en noir et blanc (j’avais acheté un an plus tôt un appareil réflex FUJI ST 605 N avec ma première paye). Mais tout cela déboule dans une caserne, un lieu pas fait pour. Comment raccorder tout cela à ce qui a précédé, à ce qui a suivi ? Vingt ans est un âge d’équilibriste, on tangue sous la bière, on bronze au soleil en attendant la quille. Juste deux dans la salle de télé encombrée de cannettes de bière à débarrasser, mon boulot de barman, avec ce type noir appelé Blanche Neige, sa manière d’éluder la plaisanterie, de ne jamais en rire, gardant un visage grave comme les deux nôtres, un soir, devant ce film. C’est tout mais je n’ai plus jamais oublié ce nom : Varda.