vendredi 26 novembre 2010

A côté

Surtout si vous avez lu Franck, je vous conseille vivement de regarder A côté, documentaire de Stéphane Mercurio, sorti en 2008 et paru cette année en DVD. Tourné dans une maison d'accueil à côté de la prison de Rennes, subtil et respectueux, il aborde la vie des familles de prisonniers avec une pudeur qui n'exclue pas la précision, au contraire : complexité des relations avec les détenus que l'on vient voir pour une demi-heure (toujours), importance du courrier, mépris de l'AP, retards, transferts, trajets, décisions arbitraires, problèmes de santé, d'argent, impossible réinsertion... C'est désespérant comme rien n'a changé, en vingt ans. Elles (et ils) ont tout mon soutien.



Chantal Courtois, épouse de détenu, témoigne.
envoyé par Iskrafilms. - Court métrage, documentaire et bande annonce.

Crossroads/12

Cela fait des mois que je n'ai mis pas à jour cette rubrique où les textes se croisent.









(apparition de Franck au 104 : banc de la boutique Emmaüs)

Bien sûr, ce qui a pris toute la place, et continue de la prendre, c'est la parution de Franck chez Stock en septembre. M'a permis de me rendre à Brest, au Mans, à Paris, à Paris, bientôt à Paris à nouveau (le samedi 4 décembre après-midi, à Sciences Po) (au passage : on trouve sur ce lien une présentation de mon travail un peu hallucinée !), bientôt à la radio (guettez France Culture dans quelques temps...). J'irai à la Rochelle pour le Quai des lettres en janvier (le 24), en parlerai sûrement encore ailleurs, un projet au moins se prépare. Et la ville haute elle aussi me fait voyager : retourner dans chaque lieu pour prendre des photos c'est se rendre à côté, bien sûr, mais pas uniquement. Cette mise à jour, très fréquente, du site (tous les samedis pour la partie audio, deux à trois fois par semaine pour le journal, dont la publication se poursuit finalement en parallèle sur le blog de la librairie Dialogues) m'interdit de passer totalement, et trop vite, à autre chose - ce que je ne voudrais pas, de toute façon.









Quelquefois on a des surprises. Ainsi ce 103 ne m'appartient pas : c'est le numéro de l'immeuble squatté de Pernety, j'en suis presque sûre maintenant. Quant au 103 bis, projet de texte de trajet perpendiculaire à Fenêtres / Open space, il a commencé de s'incarner, un soir, à la librairie Texture, avec photos. Fenêtres va vivre une seconde vie, du reste, puisqu'avec Jean-Marc Montera nous proposerons à nouveau, le 21 janvier prochain à Montreuil, la lecture musicale que nous avions faite à Marseille en 2007 et que l'on peut écouter ici.












(Marseille, Bibliothèque départementale BDP, 2007)

Ce que je dois faire, pour l'instant, c'est m'occuper des oloé, qui devraient paraître en février prochain aux éditions D-Fiction : il faut écrire les inédits, réfléchir aux images, à la maquette... S'inspirer de Montreuil, aussi, ville qui va donc m'accueillir en résidence à partir de décembre dans la médiathèque Robert Desnos. Trouver le lieu idéal où lire où écrire à Montreuil ? Peut-être, qui sait ?












(Montreuil, chantier devant la médiathèque)

J'ai dans l'idée également d'y installer Dita Kepler, accueillie, elle, par Christophe Grossi ce mois-ci lors des Vases communicants. Si j'avais lu des passages de ce texte au 104 l'an dernier en public, je n'avais jusque là jamais voulu qu'on en voit une ligne...
J'aime beaucoup la recherche sur les corps et l'identité de Christophe, et le texte qu'il a placé ici m'est très proche. Il vient justement de le poster sur son site : prenez la 6 ou la 9, passez voir.









Lors des prochains vases co, vendredi prochain, j'échangerai avec Piero Cohen Hadria, voisin et ami, tel qu'il le dit pendant le week-end. Le lieu ? Entre Colonel Fabien et Belleville : le long de la 2, autrement dit, cette ligne que nous partageons et qu'il évoque régulièrement dans le Petit journal (entre autres) tandis que j'entame, au même endroit, une petite chronique de la nage.










(décor Alice au pays des merveilles de Tim Burton, Galeries Lafayette)

Il y a encore à Décor Lafayette, auquel se ré-atteler aussi (ça urge, même, me crient les grands magasins, quels qu'ils soient). A suivre, donc (je ne peux dire que ça...).

mardi 23 novembre 2010

suite du post précédent










Deux phrases sur le bras d'une nageuse, disparues à l'entraînement.

samedi 20 novembre 2010

Montreuil, au tout début

Un matin, de froid, d'humidité, 9 heures à la mairie.









C'est une apparition furtive, se rendre à une réunion qu'on ne peut suivre jusqu'à la fin, se cogner à la porte d'entrée, sonner, se présenter, s'asseoir dans le fond de la salle. Dans le sac, l'appareil-photo : avoir si peu, jusqu'à présent, arpenté la ville.









C'est d'un tout début qu'il s'agit : avancer sur du presque rien, longer une ou deux rues, n'avoir encore devant soi ni temps ni disponibilité d'esprit.












Mais dans ces quinze minutes de déambulation, se faire une première idée









de la couleur









de la texture












de certaines configurations.












Montreuil, ville qui m'accueille dans sa médiathèque de maintenant à juin, en résidence, nouvelle que je m'en vais fêter, là, maintenant, tout de suite (des mois que je l'espère).









Et avant d'en dire plus sur les projets, ce qui est prévu, etc., envie très simple de la partager, cette nouvelle, enfin...

mercredi 17 novembre 2010

Est-ce que ça s'appelle un bureau ?

une écharpe rouge ; un appareil-photo ; un sac de la librairie des Buveurs d'encre contenant un manuscrit, un marque-page de la bibliothèque et une facture sous enveloppe, à envoyer, ne manque que le timbre, elle a failli passer à la poubelle, tiens ; Sébastien de Jean-Pierre Spilmont ; Bestiaire domestique de Thierry Beinstingel ; Ma mère à boire et Feu de Régine Vandamme ; un exemplaire de Franck qui n'est pas celui, déjà un peu abîmé, dont je me sers lors des lectures ; un câble énigmatique ; un torchon propre et froissé ; un sèche-cheveux ; un emballage vide d'ampoules électriques 60W haute consommation ; le Télérama de la semaine en cours (pas ouvert) ; un vieux Télérama avec Keith Richards en couverture ; CosmoZ de Claro ; la relance de la facture précédemment citée ; un second appareil-photo ; un exemplaire de Fenêtres ; une lettre non ouverte de France Telecom ; Libération du 8 octobre ; un Télérama avec Javier Bardem en couverture ; un collier ; Jean Genet, menteur sublime de Tahar Ben Jelloun ; le programme des dédicaces de la librairie Longtemps ; deux chéquiers ; une prise avec adaptateur pour la batterie de l'appareil-photo (le premier) ; un relevé de compte datant de février ; une lettre d'employeur ; une pince à épiler ; Libération du 16 et 17 octobre ; Le Maine libre du 16 octobre, rapporté du salon du livre du Mans, titré "Marina : les parents sur les lieux du drame" (pas lu) ; le programme et le supplément Ouest-France consacré à ce même salon ; un marque-page donné par mon voisin de dédicaces, résumant son roman ; le programme de "Mon expo en vitrine" 2010 ; une lettre personnelle ; le feutre noir indélébile que je cherchais l'autre jour ; deux post-it ; un manuscrit ; une housse noire ; une autre lettre de rappel ; une publicité de la salle Pleyel ; une invitation à un vernissage au château de Saint-Ouen ; plusieurs dépliants de la Cité des sciences ; un flyer pour un "broc dej" ; deux enveloppes vides ; le programme de la Ferme du Buisson du mois d'octobre ; un flyer de la bibliothèque Robert Desnos à Montreuil ; un billet d'entrée pour la soirée de Fred Griot du mardi 28 septembre à Pantin ; une carte de réduction de la SNCF ; un dépliant pour le festival America de Vincennes ; un ticket d'entrée pour le zoo de Berlin ; un ticket d'entrée pour les jardins de Chaumont-sur-Loire ; un ticket de métro parisien ; la carte d'un hôtel à Chamberet ; un ticket de métro allemand ; un tout petit carnet bleu ciel ; la dernière page du début de Au 103 bis lu à la librairie Texture la semaine dernière ; une lettre avec facture non ouverte ; une barrette ; un appareil-photo jetable ; une règle décorée de chromos publicitaires du chocolat Poulain (vers 1900) achetée au musée Jules Verne d'Amiens ; un autre chéquier ; un marque-page de la Bellevilloise, faisant ma pub, du temps de ma résidence ; une agrafeuse ; un flyer pour les éditions Asphalte noir ; un bracelet ; un petit livre de recettes de thés ; un casque anti-bruit acheté dans un magasin d'aviation ; une compilation Rock en Seine ; une invitation à une conférence de presse ; un billet pour un concert-lecture de Serge Teyssot-Gay à Saint-Ouen ; un flyer pour la réédition de Nathalie Granger de Marguerite Duras ; un ticket d'entrée pour monter à la tour du guet de Pérouges ; une carte postale représentant une rivière ; un petit mot ; un sac de la librairie Longtemps ; un catalogue ; Berlin, l'éternel faubourg de Matthias Zschokke ; le guide du musée de la communication de Berlin ; cinq autres marque-page ; un ticket de caisse de Monsieur Bricolage ; une publicité pour prendre des cours de tennis ; une liste de fournitures ; une feuille ayant servi à se repérer dans les fichiers son de la ville haute ; un programme de cinéma ; un plan de Paris ; trois gélules de Dafalgan ; deux stylos-bille ; un élastique ; une seconde lettre personnelle ; un feutre noir ; une sorcière ; une pile de livres et DVD comprenant les titres (je renonce à écrire le nom des auteurs, sinon elle s'écroulera) : Ecrivains en séries ; Agnès Varda : le cinéma et au-delà ; Bruits et sons dans notre histoire ; Le Palais-Royal ; Le Détail : pour une histoire rapprochée de la peinture ; Journal ; L'Espace vide ; L'Art et la manière d'aborder son chef de service pour lui demander une augmentation ; "53 jours" ; Fellini ; Cap au pire ; Mille milliards de milieux ; Apprendre à photographier en numérique ; Les Aventures du baron de Munchahausen (que je dois rendre depuis longtemps à quelqu'un qui passera peut-être par ici) ; Fellini ; L'Antarctique). La pile comprend également plusieurs carnets et une chemise dans laquelle sont regroupées des pages imprimées de Dita Kepler ; une enveloppe sur laquelle sont notées quelques informations à propos de la lecture de Fenêtres que je ferai en compagnie de Jean-Marc Montera le 21 janvier à Montreuil ; la liste des journalistes qui ont reçu un exemplaire de Franck (voilà pour la pile de droite, passons à celle de gauche) ; le carnet rouge dans lequel j'ai pris des notes au 104 pour Au 103 bis ; une brochure intitulée "Ecritures contemporaines / Publics du secondaire" ; une lettre de la mairie du XIXe arrondissement ; encore deux enveloppes vides ; En vue, magazine des bibliothécaires de la ville de Paris, novembre-décembre 2010 ; des feuilles imprimées annonçant un festival à venir ; des feuilles imprimées permettant de suivre un parcours artistique autour du canal de l'Ourcq ; mon exemplaire un peu abîmé de Franck ; des histoires pour enfants écrites à la main ; la Gazette du 19e ; un acte de naissance ; une carte de réduction ; Basilic, gazette de l'association des amis de l'Amourier ; une invitation à une fête d'anniversaire ; Libération du jeudi 16 septembre ; quelques petites feuilles carrées et agrafées, données par un libraire de la librairie Dialogues à Brest pour que je prenne des notes ; une lettre de la banque ; un papier sur lequel est écrit "réservé" ; le magazine d'Air France dans lequel je veux garder un plan des Galeries Lafayette ; une carte d'activité d'un centre de loisirs ; un marque-page au dos duquel j'ai pris des notes pour Décor Lafayette ; Le journal de Mickey ; une carte de pub pour "SNCF direct" ; un cahier rouge qui me servait de journal jusqu'à ce que j'entame le journal de publication de Franck ; des recettes de cuisine ; un sac plastique du magasin de musique Woodbrass ; deux dessins qui représentent mon prénom ; un mot d'Yves Jolivet me souhaitant bonne chance pour la parution de Franck ; une enveloppe contenant le DVD d'un documentaire sur des prisonnières (Les Résidentes, d'Hélène Trigueros), accompagné d'une petite lettre ; un devis ; une plaquette de présentation de In situ, artistes en résidence dans les collèges ; le Magazine des aéroports de Paris ; une grande enveloppe vide, en kraft ; deux ordonnances ; une facture ; une lettre personnelle ; un programme du théâtre du Châtelet ; un compte-rendu de réunion ; Causette ; le programme de la rentrée littéraire des éditions Belfond ; les épreuves de Franck ; une enveloppe vide ; Entre ciel et terre, les toits de Paris (livre de photographies acheté aux puces de Saint-Ouen) ; Istanbul, Guide Gallimard, collection "Ecrivains voyageurs" ; un dépliant d'agence immobilière ; une lettre que je n'aurais pas dû garder ; une carte de voeux du 104 ; un dépliant de la Scène du balcon pour une rencontre avec Latife Tekin ; un cahier de notes pour un projet de livre ; un "journal de travail" ; un texte écrit lors d'un atelier de Pierre Ménard ; deux versions successives de Franck ; un livre sur Moscou écrit en russe ; mon premier journal de publication de Franck ; un grand cahier contenant, entre autres, des cartes postales et des extraits de journaux ; une pochette avec des textes que je n'ai pas envie de relire ; hors piles : un petit robot qui se remonte ; un livre sur les cheminées de Roubaix ; deux carnets achetés à Béthune ; les livres que j'ai achetés en gare quand j'allais voir Franck en prison ; un plan de Paris ; deux petits lexiques d'architecture ; un carnet ; Les Villes invisibles d'Italo Calvino ; la cassette de The Trinity Session, deuxième album des Cowboy Junkies ; un brin de faux buis ramassé dans le jardin de la villa Arpel au 104 ; des cartes postales ; une paire de lunettes dans son étui ; deux plumiers ; deux petits flacons contenant du sable ; des CD ; des coupures de journaux ; des cassettes audio ; et encore un nombre assez grand de carnets et de livres que cette fois je renonce à détailler, il est tard et ça suffit bien.

Une photographie est-elle nécessaire ?
Je l'ai prise avant de ranger (noter / ranger /noter /jeter). J'ai noté par strates : les dernières (versions de Franck, etc) sont les plus anciennes.

Quelques instants plus tard, à la demande générale de deux de mes camarades sur Twitter, voici la preuve de ce que j'avance :





















(sur le web, certainement pas, mais sinon, Philippe de Jonckheere a un peu de concurrence !)

samedi 13 novembre 2010

être lu par (qui vous lisez)

C'est la mise à jour du site de Thierry Beinstingel qui me pousse à écrire ce court article, la surprise de découvrir que toutes les rubriques :
étonnements
notes d'écriture
notes de lecture
et webcam
sont consacrées à Franck (le livre) et à Franck (lui).


J'ai découvert les textes de Thierry Beinstingel il y a dix ans environ, ai lu presque tous ses romans je crois (mais pas tous j'en suis sûre).

J'ai découvert les livres de François Bon il y a quinze ans je crois, ne les ai pas tous lus mais tout de même un bon nombre

(j'aime quand il me reste à lire)

et c'est pourquoi voir ce prénom sous le tiers livre, soudain, a compté fortement aussi.

Des dettes nous en avons.

Elles ne pèsent pas. Donnent envie de remercier, et poursuivre.

jeudi 11 novembre 2010

Texture

De jolies lampes pour ce bel endroit, librairie Texture, des cartons partout puis on place une table, le projecteur, l'écran, cherche des multi-prises.

(j'étais venue à pied du 103 avec micro, câble, pied de micro, ordi, livres, texte imprimé : me faisais l'effet d'une femme-orchestre en montant l'avenue Jaurès)

(Jaurès, centre de ce "103 bis" que je venais lire, justement)



On attend un peu, juste le temps qu'il faut.

(je pensais qu'il n'y aurait presque personne et puis si, nous étions une bonne quinzaine pour cette lecture-projection)

(sans compter les passants, qui par la vitre, paraît-il, jetaient un oeil sur les photos en faisant semblant de regarder les livres !)


Dans mon dos, le rayon Genet.

Juste avant la lecture, ce hasard : rencontrer un ami de la libraire qui vient de publier une thèse sur ses romans.

(ceux qui aiment Mélico se souviendront peut-être de 'Querelle de Brest' à 16 ans) (ceux qui ont lu 'Franck' se rappelleront peut-être le mémoire de maîtrise que j'ai écrit sur lui)


Il faut dire maintenant tout le soutien de la libraire, Michèle, et l'ambiance chaleureuse, et le bel accueil, et ce 103 bis finalement à sa place, et le lien avec Franck qui se fait aussi.

(j'ai lu le premier passage à Jourdain, qu'on peut entendre ici)

Dire la soirée si réussie, l'impression d'avoir été au bon endroit, au bon moment, pour les bonnes raisons : l'harmonie.



Et quand à la fin un de vos amis se transforme en homme-paysage, c'est encore mieux.








Projection-lecture créée pour "Mon expo en vitrine", manifestation de photographes du XIXe arrondissement (qui se poursuit, passez voir).

Au 103 bis : texte en cours d'écriture corrélé à Fenêtres / Open space. Il évoque un trajet qui permet d'arriver au 104.

lundi 8 novembre 2010

Métro de Lyon

Il est évidemment étrange, pour quelqu'un qui a écrit, à une époque, sur le métro parisien, s'est intéressé aux panneaux, affiches, stations et lignes, de voir soudain son nom dans le métro lyonnais.










Ne pas le voir "en vrai", en photo seulement, sans savoir combien d'autres noms s'y trouvent, ni la taille de l'affiche, ni son emplacement.









Essayer de deviner. Renoncer. Remercier qui a pris cette photo : celle qui a permis que le livre se fasse, existe, en donnant le bon conseil, en disant : Brigitte Giraud lance une collection chez Stock, tu devrais lui envoyer ton manuscrit (poste de la rue Sambre et Meuse à Paris, si vous voulez tout savoir) (et quand on clique sur le lien, on lit cette phrase, sous une carte qui refuse d'apparaître : Dans certains cas, le positionnement des points de contact recherchés peut être approximatif).

Pas dans celui-là !

Merci à Marie-Hélène Desestré pour la photographie et, bien entendu, à la librairie Decitre, à Lyon, dont je savais le soutien ("nos libraires ont aimé"), sans pouvoir imaginer que... (mon nom sur le mur me paraît encore improbable : je n'arrive pas à finir la phrase !).

Un merci tout particulier à celle qui, chez Decitre, défend si bien mon livre : Sandrine, rencontrée à cette occasion.

jeudi 4 novembre 2010

Silence radio, de Christophe Grossi








Ici, chaque matin nos corps passaient de la 9 à la 6 à Nation. Là-bas, les fenêtres semblaient plus vastes quand elles avaient une page devant des yeux ouverts. Si près de nous, l'ordre des lois et les avis de sécurité contre nos quatre sans nom. Tu parleras plus tard de là où nous étions.


Ici, chaque matin à quelques minutes près, nos corps se collaient coûte que coûte à la vitre. Là-bas, les pages étaient offertes au spectre infini du regard. Si près de nous, l'âme étroite se signe au-delà du geste qui rectifie l'arme à l'oeil. Tu parleras plus tard des regards aveugles.


Je ne veux plus de cette lampe à la fenêtre, des barreaux, des persiennes, abri des secrètes luxures.


Ici, chaque matin (jamais le soir) nos corps avaient rendez-vous avec une femme debout sur son balcon étroit, porte-fenêtre ouverte derrière elle, les deux bras levés (salut, incantation, signe désespéré, gymnastique ?). Là-bas, on s'enfumait dans un réalisme spongieux qui ramassait la tourbe et le lierre. Si près de nous, le coccyx est à moitié rongé de l'intérieur. Tu parleras plus tard de ce qui se tramait.


Ici, chaque matin (douzième ou treizième étage ?), nos corps ne sont jamais parvenus à se mettre d'accord mais ce repère, si, la femme en rouge, la seule à lever les bras, ils ne la manquaient jamais. Là-bas, les corps, on les regardait les yeux fermés, le soleil dans le dos ou mieux encore : à contre-jour. Si près de nous, chaque emplacement du cimetière est en passe d'être géolocalisé. Tu parleras plus tard du nombre de minutes avant le signal.


Je ne suis plus derrière la vitre où se brisait sa gerbe et le bric-à-brac confus.


Ici, chaque matin pendant près d'une semaine, nos corps ne parvenaient plus à lire. Là-bas, on rêvait de quoi, pastorale au réel enfumé ? Si près de nous, secrétions, transferts, rémissions, squelette face-profil, amygdales ôtées le premier de chaque mois au lasso dans une chambre où se pressent les acolytes alcooliques en but aux mêmes items. Tu parleras plus tard du rêve interrompu.


Ici, chaque matin, dix stations, sous terre d'abord avant de filer dans le vent. Là-bas, imaginer nous rendait plus saouls encore, vertigineux. Si près de nous, les fenêtres ouvertes-fermées, horizon bouché, les vies intérieures zappées. Tu parleras plus tard du nombre de voitures au mètre carré.


Je ne suis pas de ceux qui brillent aux carreaux.


Ici, chaque matin, Picpus, Bel-Air, Daumesnil, Dugommier, Bercy, Quai de la Gare, Chevaleret, Nationale, attention on approche de la Place d'Italie. Là-bas, des lampes s'éteignaient. Si près de nous, ce laps de temps où rien n'est aboli, où ça fleure bon l'austérité et le mauvais passe-temps. Tu parleras plus tard des têtes à queues, des nez à culs, des bêches.


Ici, un matin plus rien, un mardi plus personne après Corvisart. Là-bas, on ne savait pas ne pas enfouir. Si près de nous, le fusil fier d'être armé se tient bien droit dans l'entrée. Tu parleras plus tard de la radio qui annonce parfois le pire.


Je vous laisse fermer partout portières et volets.


Ici, le nez à la vitre, depuis que ce corps devant la porte-fenêtre a disparu, nos corps ne le font plus. Là-bas, on se pliait en deux pour voir quoi encore ? Si près de nous, le frigo ne ronronne plus en cadence depuis que des membres se congèlent dans les sacs Prisunic. Tu parleras plus tard de l'élégance des lignes brisées.


Ici, nos corps ne peuvent plus. Veulent plus. Mal armés pour ça. Pas coordonnés. Là-bas, comment savoir ? Si près de nous, combien de mètres de sparadraps à avaler avant que les fenêtres ne s'ouvrent ? Tu parleras plus tard du corps sur le balcon que tu n'as pas vu tomber près de Corvisart.


Je ne guérirai pas à côté de la fenêtre.


*

Tout ce qui apparaît en italique est emprunté à Charles Baudelaire.

Le texte "silence radio", créé spécialement sur Fenêtres Open space dans le cadre des vases communicants de novembre 2010, sera intégré plus tard aux corps pluriels, série débutée en septembre 2010 sur déboîtements.

*

Ce texte a été écrit par Christophe Grossi dans le cadre des Vases communicants, ensemble polyphonique initié par Tiers Livre et Scriptopolis. Le principe : le premier vendredi du mois, chacun écrit sur le blog d'un autre. Ne pas écrire pour, mais écrire chez l'autre.

Pour découvrir ma proposition de novembre, c'est par ici.

Ci-dessous, la liste des 12 autres échanges du mois. Un Merci chaleureux à celle qui les réunit, Brigitte Célérier.


Brigitte Célérier et Piero Cohen-Hadria

Pierre Ménard et Daniel Bourrion

Isabelle Butterlin et Lambert Savigneux

Cécile Portier et Joachim Séné

Marianne Jaeglé et Olivier Beaunay

François Bon et Bertrand Redonnet

Landry Jutier et Jérémie Szpirglas

Anita Navarrete-Berbel et Lauran Bart

Juliette Mezenc et Christophe Sanchez

Murièle Laborde Modély et Sam Dixneuf-Mocozet

Matthieu Duperrex et Scriptopolis

Arnaud Maisetti et Laurent Margantin

lundi 1 novembre 2010

Les Anges, Violeta : lecture de la page 48 chez Liminaire

J'ai déjà évoqué ici ce roman de l'écrivain portugaise Dulce Maria Cardoso, paru à L'Esprit des péninsules. Il m'a suffisamment marquée pour le choisir, lui et pas un autre, lorsque Pierre Ménard m'a interrogée sur mes lectures pour Mélico, et demandé de lui apporter un ouvrage dont je lirai une page 48.

Désormais, et j'en suis très contente, on trouve cette lecture sur le site Liminaire : la voici.