samedi 10 janvier 2009

Que dire ?

Hier après-midi, à l'atelier web de Bagnolet, tour de table. Quand c'est à moi je dis comment je m'appelle puis, bouche bée, finis par prononcer quelque chose comme eueueuh. C'est tout. Alors ? Comment se présenter ? D'habitude je m'en sors comme ça : je dis j'écris, je tiens un blog, s'il le faut je parle de Fenêtres, ça n'engage pas. Cette fois, rien.

François Bon me tire de là avec humour, lance une ou deux phrases dans lesquelles on entend : écrivain. On sait bien qu'avec ce mot-là rien n'est simple. Soupçons, méfiance, paralysie, mépris, ironie, effarement : le non-dit sédimente depuis la nuit des temps. Ecrivain n'est pas un métier. Ecrivain ne signifie rien. Tout le monde veut être écrivain. Celui-là se croit écrivain. Je vous présente untel, écrivain. J'aurais rêvé d'être écrivain. Etc. On sait aussi que le fantasme est en baisse : avocat d'affaires désormais bien mieux qu'écrivain.

Est-ce qu'avec musicien c'est pareil ? Avec peintre ? Comédien ? Il faudrait le leur demander.

Je suis écrivain. Depuis quelques jours je passe mon temps à dire qui je suis et ce que je fais. Grande nouveauté : j'arrête de "mentir" en parlant d'une activité payée qui d'habitude me fait vivre (au choix : journaliste, correctrice - être un minimum consciencieux n'empêche pas le sentiment d'imposture). Là, plus de revenus, que de l'écriture : il n'y a plus d'écran, alors il faut bien dire.

Et pourquoi pas je suis écrivaine ? Pour ça une réponse toute simple : j'ai voulu devenir écrivain vers 8-10 ans. Je pensais : quand je serai grande je serai écrivain. Ecrivaine n'existait pas. Si on me le donne maintenant, qu'on me le troque contre écrivain, j'aurai le sentiment qu'on me prend quelque chose, qu'on me refuse quelque chose. C'est sans doute débile mais comme ça. Ecrivain est dans le soupçon (de prétention, d'escroquerie), écrivaine y échappe mais pour confiner au néant (je parle évidemment des termes, et ma phrase n'est que subjective - mais tant que ça ?).

Etre écrivain ? Depuis l'enfance signifie être libre, et c'est tout.

Esprit d'escalier aidant, quelques minutes plus tard j'ai eu envie de dire, mettant de côté l'écriture, justement : anime un blog qu'elle donne pour littéraire alors que depuis quelques temps elle n'y insère que des photos. Photographe, alors ? Ah non, sûrement pas : n'y connaît rien, ne sait pas prendre des photos, s'offre entière à l'autofocus.

(d'autant que j'avais Philippe de Jonckheere juste en face de moi !)

De toute façon c'était trop tard. Fatigue d'avoir dit toute la semaine : je m'appelle unetelle, je suis écrivain, voici mon nouveau projet.

Pour les présentations, rien à faire c'est mieux ici, où je peux déclarer sans mentir : suis dans la maçonnerie, fabrique des briques et des parpaings.

(photo : réverbère de Bagnolet)

4 commentaires:

  1. Il n'y a pas de métier qui ne soit une imposture, tu le sais bien, et un écrivain, c'est quelqu'un, quelqu'une, qui écrit des livres et les fait publier, les fait vendre et reçoit, en échange, des droits d'auteur. Pas à chercher plus loin : le subjectif, l'objectif, la vérité, la réalité et le fantasme, tout ça c'est des bidules qui ne servent à rien, tout ce qu'il y a à faire, c'est écrire. Le reste ? Littérature... Mais c'est bien aussi eueueuh... Tu as ta place, garde la, et surtout continue tes projets, c'est bien là l'important. Amicalement
    PdB

    RépondreSupprimer
  2. Merci une fois de plus de tes encouragements, PdB...

    "tout ce qu'il y a à faire, c'est écrire" : vrai au point qu'avant, quand je n'étais pas publiée (ni lue ni vendue, donc), je me sentais exactement à la même place qu'aujourd'hui en ce qui concerne l'écriture. Mais oser dire "je suis écrivain" quand on n'est pas publié : bon courage !!
    A bientôt.

    RépondreSupprimer
  3. Gêne partagée. On peut toujours dire "auteur de" plus le(s) titre(s) ; après tout, ce qu'on fait compte plus que ce qu'on est.
    (J'ai vu de la lumière à la Fenêtre, je suis entré...)

    RépondreSupprimer
  4. Vous avez bien fait : ça m'a permis de jeter un oeil par le hublot...

    RépondreSupprimer