jeudi 23 février 2012

M. (à nouveau)

J'ai dit : non, je ne dirai rien de ce qui me lie à la ville de M.

Il ne faut dévoiler ni les portes d'accès ni les lieux qu'on s'invente ni la peur de s'y perdre ni les aller retour dans le temps et l'espace ni ce qu'on en espère façades détournées trottoirs pris à rebours comme dans le ciel paroles échangées silences et musiques qui nous accompagnaient
comme dans le ciel une ville fluide
les chantiers les travaux les graphes les ruelles
labyrinthe inversé jeu de piste et bascule
dans la marche la course dans l'immobilité
non ne pas discourir
surtout
comme dans le ciel une ville fluide sous mes yeux surgissait qui n'avait rien à voir avec la ville de M.

Il ne faudra pas dire ce qui par l'écriture modifierait la ville
ni le corps ni l'esprit envahis par la boucle
boucle de l'écriture qui à mesure avance et efface les traces et condense les pas
et nous donne parfois l'air vague de qui regarde en ayant modifié la trajectoire et l'angle
de qui passe la rue
a parlé à ses morts
et ne sait plus sa place

à la place il faudrait pouvoir dire les joies

mais si c'étaient les mêmes

joies fictives de ta vie de fiction où tu marches sans but n'a pas de comptes à rendre
il n'y a pas de frontière entre ce que tu inventes ce qui est devant toi utile et inutile vie et mort d'un même corps et c'est tout le vertige
c'est toute la question et c'est tout ce qu'on tait pour pouvoir avancer

je ne dirai jamais la ville réaliste
on ne me verra pas la boussole à la main
mais me laisserai guider par qui le voudra bien
quitte à m'y perdre mieux

une ville fluide qui n'avait rien à voir avec la ville de M mais nulle part ailleurs ne pourrait se trouver

*

Texte lu hier lors de la soirée de clôture de ma résidence, en réponse à une question ("Quels sont vos liens avec la ville de Montreuil ?") qui, sur l'instant, m'avait laissée muette.

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