dimanche 27 décembre 2015

Crossroads / 28

La dernière fois qu'est apparue cette rubrique, il y a six mois environ, j'évoquais ce qui était en train de se terminer (l'écriture de Diptyque), ce qui était en cours (Bruits), ce qui allait arriver (la parution d'Anamarseilles, L'aiR Nu en résidence à Moret).
Alors, où en sommes-nous ?



Nous sommes à la gare de Moret. Nous descendons du train, prêts à nous perdre dans les environs (cela s'appelle De la ville au Loing, journal fictif en cours d'écriture pour la résidence de L'aiR Nu)



Nous sommes dans la salle du théâtre de Bouxwiller, en Alsace, pour la première de Diptyque : ce sera le 9 janvier prochain à 20h30 (ci-dessus, une partie du texte et la danseuse Magali Albespy, photographies de Pièces détachées).



Attention, ça se complique : le même jour, le 9 janvier, à 18h00, nous sommes également à la bibliothèque de Montigny-sur-Loing pour le vernissage de l'exposition de Mathilde Roux.
(comment est-ce possible ? L'anamorphose, peut-être ?)



Et nous nous trouvons à Marseille, encore (ici dans l'oloé rouge, ou pension Edelweiss, située rue La Fayette) surtout depuis l'enregistrement intégral d'Anamarseilles. Nous sommes au sous-sol du théâtre du Merlan où Dita Kepler a été ligotée (anamarseille 5) ; aux côtés de Jean-Marc Montera à la bibliothèque de la Joliette ; en train de traverser le parc Longchamp ; devant l'affiche d'un homme recherché ; à la gare Saint-Charles ; dans une calanque, etc.


Nous sommes dans la Vallée de la mort, en Californie, à courir avec cette jeune fille, pour un nouveau projet dont ici je n'ai encore rien dit.


A la dernière page de l'anthologie du Général Instin, parue il y a peu (nous fûmes à la Maison de la poésie lors de "sa" soirée le 4 décembre dernier, où nous le déclinâmes).


Dans l'attente de voir comment la céramiste Christine Tchepiega va utiliser des extraits de Fenêtres et Décor Lafayette, ce qu'elle compte faire bientôt (ci-dessus un soliflore à miroir d'eau qui me fascine).


Et nous sommes également en vacances, pour finir, ce qui signifie que nous ne sommes pas, là, tout de suite, en atelier d'écriture à Villetaneuse ou au Blanc, moins encore à préparer une conférence sur la littérature et le numérique pour la canopée d'Evry qui aura lieu le mois prochain. 
Ni même, non plus, à Veneux, pour le festival de L'aiR Nu qui se déroulera le samedi 23 janvier et dont je reparlerai très bientôt. 
Non, non. Pour l'instant, nous sommes simplement à Marseille, dans la région de Moret, à Bouxwiller, la tête dans le bruit et près de Los Angeles : une fois de plus, à la croisée des chemins.

(nb : et en 2016, veiller à ne pas abuser de ce nous qui flotte entre singulier et pluriel, n'est-ce pas ?)

mercredi 16 décembre 2015

Anamarseilles, à l'intérieur




Je suis en train d'enregistrer Anamarseilles en entier, en suivant le découpage du texte. L'ensemble sera à disposition, en écoute gratuite sur le site de la Marelle quand j'aurai terminé, proposition faite à Pascal Jourdana dans l'idée d'effectuer, de mon côté, une dernière chose pour ce livre après en avoir annoncé la parution ici et ailleurs, publié des extraits, lu le début en public, envoyé un mail à quatre-vingt-dix-neuf personnes et tenté de créer une vidéo à partir d'un diaporama sonore (échec cuisant et renouvelé).
Pascal a dit oui.



Lire à voix haute, enregistrer seul-e dans sa chambre est une chose très intime. Pendant que j'écris cet article, je réécoute ce que j'ai déjà lu et monté et je cherche, parmi les photos de 2012, celles qui sauront le mieux dire ce moment. Les images prises à l'intérieur de la villa, que je n'avais presque jamais montrées, m'appellent tout à coup.



(on voit ici le sac à pommes rouges dans lequel j'ai rangé depuis les cartes postales de Maryse Hache et celui du Merle Moqueur, offert par Marie-Hélène Desestré au Cent Quatre. Le lit n'est pas très bien fait, j'en conviens)

J'écoute et je vois à quel point ce livre est lié à un ou plusieurs labyrinthes, comme greffé, plaqué dessus, happé par les chemins, les impasses qu'il's) dessine(nt). Le labyrinthe, c'est le cerveau de Dita Kepler, sans cesse au bord du court-circuit tant elle a peur d'être façonnée par ce qu'on attend d'elle - c'est en tout cas ce qu'elle imagine. C'est aussi les quartiers qui rayonnent autour de la Marelle, rues qui montent et descendent au point que la géographie en est bouleversée : il devient possible, par exemple, de faire grimper un fleuve en haut d'une colline. 



Dans l'anamarseille #1 au bout d'un moment elle est perdue, Dita, et nous aussi, il faut avouer. C'est normal, elle apprend à relier les contraires, ce qui n'est jamais évident. Il faut un peu de courage pour continuer. 



















Dans l'anamarseille #2 apparaissent le fleuve et la colline, qu'il ne faut pas voir telle quelle d'abord, ni gravir tout de suite. Tout étant, ici, sujet à métamorphose, c'est en premier lieu un théâtre, celui de la Colline, bien sûr, où se joue une adaptation des Autonautes de la Cosmoroute - une histoire de trajet Paris Marseille, tiens tiens. A travers le livret de la pièce, Julio Cortazar confirme à Dita l'idée de voyager à travers les lettres de l'alphabet. Pour elle, l'appui, ce sont les A, B et C qui dessinent les anamorphoses et sous lesquelles elle met un nombre incalculable de choses (C comme Colline, comme ciel, comme craie, comme caillou, comme Cortazar...).



(autre chambre de la Marelle)

Tout en écrivant, j'écoute le texte lu, donc. Quand je me (re)lis, je vois bien que c'est compliqué, cette histoire, alors j'ajoute : aucune substance hallucinogène n'a été consommée ni cachée en ces lieux. 



Dita Kepler, c'est ma façon de conjurer les angoisses, les heurts. De faire un portrait des méandres.
(ici, dans l'entrée)
De mimer la plasticité de nos circuits, de nos avancées, de nos reculs. Je ne sais pas à quoi ça ressemble, ni si ça ressemble à quelque chose de connu. 



En tout cas, il y a du monde, dans ce livre solitaire, plein. Des écrivains, des gens qui donnent des cadeaux, des passants. Dans la partie Anne à Marseille, on croise des amis, perdus ou non, morts ou vivants. On trouve le contenu, par le menu, de la valise bruitiste de Jean-Marc Montera. Et un faux souvenir d'enfance. Des cages ouvertes. Le portrait d'un homme recherché... 

Vous avez vu ? On est sortis, ça y est.
Je retourne à mes sons. A très bientôt j'espère. 

dimanche 13 décembre 2015

douceur de L'aiR Nu




Je n'ai pas envie d'en dire tellement plus que cette photo prise par Sandrine Vallée de la Communauté de communes de Moret le soir de l'inauguration de notre résidence, quelques minutes avant notre passage sur scène : tout y est. 



Alors quoi ? Raconter qu'on travaille plutôt beaucoup, en réalité, pour pouvoir à la fois assurer cette résidence, poursuivre notre projet collectif en dehors, trouver de l'argent pour tous et pour chacun tout en déroulant vaille que vaille nos projets personnels ? 
(ci-dessus la mascotte du groupe et le carnet bleu qui sert pour Moret, photo de Joachim)















Oui, il n'y a pas de raison de ne pas le dire. 
Je devrais attendre la mise en ligne de notre prochaine page, sans doute ; faire une annonce tonitruante, aussi, dire que vous pouvez adhérer, nous soutenir, grâce à ce nouveau lien sur le site.
Oui. Oui, oui. 
Mais ce dont j'ai envie, depuis quelques jours déjà, c'est simplement d'intituler un billet de ce blog douceur de L'aiR Nu. Parce que ce collectif nous porte (je crois que je peux dire nous à cet instant précis). Que nous nous sentons à notre place à tenter du nouveau. Que nous nous retrouvons parfois face à des vents contraires, froid chaud chaud froid douche écossaise pour tous et voilà que ça résiste, nous résiste, nous chasse, nous atteint. Mais il y en a toujours un (ou deux, ou les quatre, ou les six même, car en fait nous sommes six) pour inventer un truc, envoyer un lien ou une vanne, dénouer la situation, redonner de l'élan.

(ci-dessus le montage de Mathilde pour illustrer la résidence)



Nous sommes six car, en association depuis le 1er septembre, nous avons demandé à Philippe Diaz (ou Pierre Ménard, allez savoir) d'être notre président et à Caroline Diaz de devenir notre trésorière, et ils ont dit oui. Six, donc, à garder les fenêtres ouvertes, à écouter les trains et le reste, à s'équiper avant de partir, à utiliser les ciseaux et le code, le clavier et l'enregistreur, le Navigo, la carte, le papier... A tenter de respirer un peu.

(douceur : ci-dessus le panneau qui présente L'aiR Nu à la médiathèque d'Ecuelles. Chaque fois que j'entre dans une des bibliothèques de la CC j'en trouve un qui veille...)

mercredi 9 décembre 2015

De la ville au Loing #6




Cette fois c'est Vernou, avec arrêt préalable à la gare de Saint-Mammès déjà visitée. A Fontainebleau, le beau temps de Paris a brusquement viré à l'humide, au gris qui flotte entre les arbres nus. 





































Saint-Mammès à midi : nul bruit, si ce n'est celui des annonces de vigilance liées aux attentats qui résonnent dans le vide. Elles font oeuvre de fiction ici, restituent le souvenir flou d'un roman d'anticipation lu on se demande à quel âge, il y a combien de temps.











































Il y a de la fiction ici ? Peut-être.

 






A la bibliothèque de Vernou il y a des visages, des corps, des histoires, des livres qui semblent s'ouvrir aux pages qu'il nous faut.








Et les choses avancent au rythme de la pendule, pour une fois, tandis que dans une autre pièce certains écrivent leurs oloés.

samedi 5 décembre 2015

De la ville au Loing #5

















Marcher dans les rues de Veneux sans commerce ni personne aux portes ou aux fenêtres, à peine un homme à ventre rond apparaît-il de profil qui bricole dans son garage. Marcher vite parce qu'il fait froid et ce sont les chats le vrai peuple de l'après-midi. 



De toute façon la nuit va tomber. Les photos de Veneux sont prises à la volée en pensant à ce qui s'appelle donc De la Ville au Loing. L'idée d'un texte se dessine, différent de ce qui apparaît ici, articles qui n'en sont que la trace. 
Différent ? Trace ? Peut-être. Peut-être seulement. Tout est encore envisageable comme le note Pierre dans son Journal des frontières à peu près au même moment. 




(les bords de Mathilde vont me servir d'appui, je le sais. Je ne voudrais pas le dire trop fort)



(ne pas insister non plus sur ce que le journal du son de Joachim offre de possibilités. Laisser agir)



Tout peut encore, tout peut toujours servir, jusqu'à la dernière minute. Ainsi l'arbre-voitures aperçu en redescendant vers la gare ou les petits carreaux du souterrain qui conduit de Veneux à Moret. Ou la passerelle au-dessus des rails, métal, peinture, surface qui s'effrite, matière détruite qu'on écrase du pied en franchissant les voies, qui retient et fascine. Ou la rue de Seine sans la Seine. Ou un tableau de Sisley dont il est question près d'une villa Bellevue. Ou une phrase trouvée en ouvrant un livre au hasard, que le contexte éclaire et éteint à la fois. Ou un puzzle en partage à la bibliothèque, que personne ne termine. Ou...



(malgré ce jour que je montre, l'ébauche apparaît mieux la nuit)

mercredi 2 décembre 2015

Anamarseilles : tentatives de définitions















Etrange besoin que celui d'inventer des mots. Encore l'oloé a-t-il son utilité de  temps à autres : il arrive que certains l'utilisent sans savoir d'où il vient, ce qui me fait toujours plaisir. Mais l'anamarseille ? Pardon ? Comment ça ? De quoi est-il question quand on commence à raconter l'histoire d'un personnage qui, sous l'influence d'un livre d'histoire de l'art, s'anamorphose à Marseille ? (raconterhistoire, personnage sont déjà des trompe-l'oeil, comme on peut s'en douter)

Pour accompagner la parution d'Anamarseilles aux éditions La Marelle (oui, voilà, ça y est, il est sorti et j'y reviendrai sans doute un peu plus tard) en guise d'introduction, je vous propose de retrouver ci-dessous les définitions de quelques mots qui ont leur importance dans le livre et qui s'y trouvent, d'ailleurs, dès le début : je ne fais ici que les recopier. J'ajoute cependant dans ce billet la "vraie" définition de ce qu'est une anamorphose, tirée du Petit Larousse à couverture rouge de mon enfance, premier de tous les dictionnaires que j'ai reçus en cadeau.


Mais commençons.




















Anamorphose 

Dilatation, projection des formes hors d'elles-mêmes, conduites en sorte qu'elles se redressent à un point de vue déterminé.
Rébus, monstre, prodige.
subterfuge optique où l'apparent éclipse le réel

Les mots et bribes de phrases ci-dessus sont tirés du livre Anamorphoses dont il est question ci-dessous.

Selon le Petit Larousse à couverture rouge : 
n.f. (gr. ana, en remontant, et morphê, forme). Image déformée d'un objet, donnée par un miroir courbe ou par un système optique non sphérique ainsi que par les appareils à rayons X (déformation conique des ombres). II Peint. Effet d'optique consistant à déformer ce qui, vu sous un certain angle, reprend son aspect véritable. 

















(on remarquera au passage que cette page Larousse ornée d'un ananas s'ouvre sur le mot ana (recueil de bons mots, de récits plaisants) et se termine par anarchie (système politique et social suivant lequel l'individu doit être émancipé de toute tutelle gouvernementale II Etat d'un peuple qui, virtuellement ou en fait, n'a plus de gouvernement)


Anamorphoses

Anamorphoses, ou Thaumaturgus opticus, Jurgis Baltrusaitis, Flammarion, 1984, collection « Les perspectives dépravées » : ouvrage côté 704.9 BAL, contenant à l'origine une feuille-miroir métallique servant à déchiffrer les anamorphoses cylindriques afin de découvrir dans le reflet l'image cachée. Cette feuille-miroir n'y est plus. La première chose à faire est sans doute d'en trouver une autre, ou d'y substituer un élément approchant.

(nb : les illustrations de ce billet, en dehors de la page Larousse, sont issues du livre Anamorphoses. Il suffit de cliquer dessus pour les agrandir)




















Dita Kepler

mon avatar dans le jeu Second Life, plate-forme dont elle s'extirpe, où on ne la voit jamais. Personnage collectif dans le reste du monde. Peut voler, planer, se métamorphoser en fonction des lieux où elle tombe. Peut conserver une forme humaine, se changer en pans de décors, se diviser, etc. Est-elle invisible, transparente aux yeux des humains ? Peut-elle communiquer avec eux ? Ce genre de question se pose, sans réponse évidente.
Ce qu'on sait, c'est que le bruit du monde (ses slogans, ses phrases) lui traverse la tête, d'où la sensation qu'elle éprouve de ne pas réussir à penser. Ici, on constatera qu'elle est capable de lire, cependant.










anamarseille


version courte :
anamorphose de Dita Kepler, qui arpente la ville de Marseille en s'étirant d'un point A à un point C. Elle passe parfois par un point B à mi-parcours (pas toujours)

version plus longue :
Pour une raison tenue secrète, Dita à Marseille va s'anamorphoser. Elle partira pour cela d'un point A et va s'allonger, se tendre, briser ses contours, bref résoudre la question de sa forme sans jamais quitter cet ancrage, le point A, jusqu'à joindre un point C dont la distance pourra varier. De l'un à l'autre, devenue courbe, elle passera parfois par un point B.
Les points A, B, C pourront être des lieux, des textes, des hommes, des personnages, des objets, etc. Toujours aimés.
Elle, pour les lier, pourra devenir onde, fil, brin de laine, ligne, dessin, rail : nous verrons. S'enrouler et se dérouler, se suspendre, se disloquer, se lancer, s'extraire, ici comme aux alentours, tel est le programme en tout cas.












Voilà. Il y a dans le livre cinq anamarseilles qui forment une première partie, rédigée en 2012 et justement appelée Anamarseilles. La seconde, plus autobiographique peut-être, est tirée d'un jeu de mots dont je n'avais pas le début de l'idée quand j'ai écrit la première, je le jure. Vous n'avez pas encore deviné ? Elle s'intitule Anne à Marseille, ah ah, bien sûr.
(et voilà l'ana du Larousse apparu, quasi)